Parachat Vaet’hanane – La prière de Moïse

 

 

 

Les supplications de Moïse pour entrer en terre promise sont sans doute l’un des épisodes les plus poignants de l’histoire juive. Ces suppliques sont aussi le modèle de la prière, pour toutes les générations. Pourtant, cette prière de Moïse semble ne pas avoir été exaucée. Explications…

Dans la paracha de Vaet’hanane, la Torah nous fait part de la prière de Moïse, qui demanda à D.ieu de lui permettre d’entrer en terre d’Israël. En effet, même si Moïse fut le berger du peuple juif pendant quarante ans, ce ne sera pas lui, mais son disciple Josué, qui l’accompagnera en terre promise.

Vaèthanane signifie : «Et j’implorai D.ieu». La prière de Moïse, contenue dans notre paracha, est une «leçon de prière».

Mais une question s’impose: comment la Torah peut-elle nous apprendre à prier en nous donnant l’exemple d’une requête qui, apparemment, n’a pas été exaucé ? Comme bien souvent dans le Talmud, c’est une question qui va nous donner notre réponse.

Dans le traité de Sota (14a), le Talmud s’interroge: comment Moïse a-t-il pu demander à D.ieu d’entrer en terre d’Israël, alors que D.ieu lui-même le lui avait interdit ?

Pour répondre à cette double question, il faut réfléchir sur les motivations profondes de Moïse. Pourquoi Moïse voulait-il tant entrer en Israël ?

C’était pour pouvoir accomplir les commandements divins liés à la terre d’Israël (chemita, teroumot et maasserot, …). Par ce désir, il exprimait sa volonté d’accomplir toujours plus et toujours mieux les mitsvoth. D.ieu accorda le salaire intégral des mitsvoth que Moïse voulait tant accomplir, sans avoir pu le faire.

En effet, dans le traité de Kidouchine (40a), il est dit : «Celui qui souhaite réaliser une mitsva, mais qui est dans l’impossibilité de l’accomplir (vénéénasse), en sera récompensé comme s’il l’avait fait».

Sa prière fut donc exaucée, dans la mesure où il ne recherchait qu’une seule chose: se rapprocher de D.ieu, en accomplissant le mieux possible tous Ses commandements. C’est pour cette raison que la supplique de Moïse reste le modèle parfait de la prière pour toutes les générations. Car le but de toute prière doit être de se rapprocher de D.ieu.

Des chiffres et des hommes

Revenons à présent à cette prière en soi. Moïse implora de D.ieu à 515 reprises (Devarim Rabba 11,10). 515, c’est la valeur numérique (guématria) du mot vaet’hanane, premier mot de notre paracha. Le ‘Hatam Sofer, (Rav Moché Sofer – 18ième siècle), nous précise que cette valeur numérique est d’ailleurs la même que celle du mot tefila : prière. Tav : 400, Pé : 80, lamed : 30, Hé : 5.

Comment prier ? L’un des principes est donc de multiplier les prières. Car D.ieu désire les prières des Justes (Yébamoth 64a). Mais il y a parfois des prières qui ne sont pas couronnées de succès. Alors comment nous assurer que notre prière sera exaucée ?

Le ‘Hatam Sofer poursuit : en ajoutant à la prière le nombre 26, qui est la valeur numérique du Tétragramme, le Nom de D.ieu, on arrive à la valeur numérique du mot Israël : 541. Ceci pour nous enseigner que c’est uniquement lorsque la prière se dirige vers le divin (c’est-à-dire qu’elle réclame des moyens d’appliquer les mitsvoth), qu’elle peut être agréée: et c’est la mission du peuple juif, du peuple d’Israël.

Et le rêve deviendra réalité

Le Rav Yossef ‘Haïm de Bagdad, plus connu sous le nom Ben Ich ‘Haï, (19ième siècle), rapporte une anecdote dans son commentaire sur la paracha de Matoth.

Elle raconte qu’un homme totalement ignorant, qui ne savait même pas lire la prière, récitait par coeur cinq mots de la téfila chaque matin à la synagogue.

Ces mots, dont il ne connaissait en rien la signification, il les répétait en posant la main sur la tête de chacun de ses enfants pour les bénir, le vendredi soir après le kiddouch. Un vendredi soir, un sage d’une grande érudition fut invité chez cet homme, et au moment du kiddouch, il entendit ces mots sans signification. Il corrigea notre brave homme en lui disant : «Ces mots n’ont pas de sens, vous ne pouvez pas les utiliser pour une bénédiction.»

Mais la nuit qui suivit, le Sage entendit en rêve une voix céleste qui lui annonça qu’il avait tort: les mots tels qu’ils étaient dits, n’avaient aucune signification : en cela, il avait raison. Mais ce qu’il ne pouvait pas savoir, c’est que dans le ciel, D.ieu reprenait les lettres qui formaient les cinq mots pour les remettre dans l’ordre, et ils formaient alors de façon exacte une bénédiction parfaite.

Cette bénédiction valut d’ailleurs, aux enfants bénis, toute l’abondance du Ciel. 

L’érudit revint voir son hote en lui racontant son rêve.

De ce récit, nous apprenons que lorsque les intentions sont hautes, c’est-à-dire qu’elles sont dirigées vers le Tétragramme, vers D.ieu, elles sont suffisantes pour qu’au-delà du niveau de celui qui ouvre la bouche, la prière soit entendue par Celui qui entend la «telfilat kol pé» (littéralement, la prière de toutes les bouches). Qu’ensemble, nous lui adressions nos prières et qu’elles soient accordées, pour la venue du messie, bimhééra beyaménou amen.

 

 

 

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