Par un mot apparemment anodin de notre paracha, D.ieu nous demande de respecter avant tout les autres hommes, condition sine qua non à un vrai travail spirituel.
«Et voici les règles (michpatim) que tu placeras devant eux», dit D.ieu à Moché Rabbénou au début de notre paracha.
Il existe trois types de prescriptions dans la Torah : les ‘houkim, les édoth et les michpatim.
Les ‘houkim, ce sont les décrets divins, les lois que l’on ne peut pas comprendre. Les édoth, sont les lois qui commémorent un événement, comme certaines lois concernant Pessa’h ou Souccoth, quic ommémorent la sortie d’Égypte. Enfin, les michpatim sont des règles d’ordre social qui permettent aux hommes de vivre harmonieusement en société.
Ces lois concernent le comportement des hommes les uns vis-à-vis des autres (Ibn Ezra). La Torah nous dit donc dans notre sidra, Michpatim : «Et voici les règles sociales, qui régissent les relations entre les hommes, que tu placeras devant eux». Nos sages s’interrogent : pourquoi avoir placé cette paracha immédiatement après avoir parlé du Beth Hamikdach ? C’est pour nous enseigner que le tribunal d’instance rabbinique (sanhédrin) devra siéger en face du Beth Hamikdach.
Nous apprenons ainsi que, contrairement à d’autres religions pour lesquelles le rapport avec D.ieu est sacré, alors que le rapport avec les hommes ne l’est pas, le judaïsme possède un autre ordre des priorités : en effet, nous allons devoir placer l’enceinte où les problèmes interhumains seront traités juste en face du lieu où l’on fera les sacrifices pour le service divin. Cette précision géographique nous indique donc qu’il n’est pas moins important de se comporter convenablement avec son prochain que de présenter des sacrifices à D.ieu.
Devant eux, devant qui ?
Le Ktav Sofer, commentateur du XIXème siècle, va un peu plus loin dans l’interprétation de ce verset. Le commentaire le plus connu sur cet ordre qui consiste à placer nos tribunaux à côté du Temple est qu’il ne faudra pas, à priori, s’adresser aux tribunaux d’instance non-Juifs pour traiter nos problèmes avec nos coreligionnaires (Choul’hane Arou’h ‘Hochen Michpath 26). D.ieu nous a ordonné de se présenter devant un tribunal rabbinique.
Cependant, le Ktav Sofer dit qu’il est possible d’ajouter une autre interprétation à ce verset de la Torah. On l’a vu, le premier sens de : «Et voici les règles (michpatim) que tu placeras devant eux», est de comprendre l’expression «devant eux» signifie «devant les hommes» (qui constituent le tribunal rabbinique). Mais on peut également comprendre ce «devant eux», comme étant « devant les commandements vis-à-vis de D.ieu».
En effet, dans la paracha précédente, les commandements concernant notre relation avec D.ieu étaient décrits et énumérés, notamment dans les dix commandements. On peut donc interpréter que les règles sociales doivent être mises devant eux: les commandements concernant D.ieu. Il est donc possible de dire que le seul moyen d’accéder à une relation avec D.ieu c’est d’avoir un comportement irréprochable vis-à-vis de son prochain, c’est-à-dire respecter les michpatim,
Le Ktav Sofer poursuit: l’étude de la Torah de celui qui n’aura pas ce comportement convenable envers les hommes, n’aura pas de valeur. De cet enseignement, nous pouvons observer qu’il ne s’agit pas seulement d’une équivalence entre l’axe horizontal qui relie les hommes (ben adam le’havéro) et l’axe vertical entre les hommes et D.ieu (ben adam lamakom).
Il y a ici une primauté du respect des hommes entre eux, c’est-à-dire une priorité donnée aux qualités morales (midoth). La volonté de D.ieu est que nous donnions une vraie place à l’autre, que nous le respections, que nous le considérions avec respect.
Que ces paroles nous aident à nous investir dans le travail sur nos qualités morales (midoth) et que nous puissions toujours donner une vraie place à l’autre, car sans cet élément, on ne peut jamais arriver à faire une place à D.ieu.